Le but : utiliser l’intelligence artificielle pour circonscrire les erreurs de prescription médicamenteuse et évaluer leur impact potentiel sur la surmortalité dans la région des Hauts de France.
Selon la dernière étude de l’Observatoire Régional de la Santé – portant sur la période 2006-2013 – le territoire du Hainaut-Cambrésis présente un taux de mortalité de 31% supérieur à la moyenne nationale. Si ce taux était ramené au niveau national, ce sont près de 3 000 vies qui seraient sauvées chaque année. Une situation préoccupante dont le Centre Hospitalier a décidé de comprendre les causes pour mieux l’endiguer.
« Un Centre Hospitalier est là pour répondre aux besoins de sa population. En l’espèce, au-delà de prodiguer des soins, il s’agit de comprendre les causes de la surmortalité de notre territoire et d’en venir à bout » analyse Rodolphe Bourret, DG de l’Hôpital de Valenciennes. « Pour commencer, nous nous sommes lancés dans une analyse de nos structures de soin et des taux de consultation sur le Hainaut Cambrésis. A l’issue de cette phase, nous avons eu la confirmation que nos structures étaient en quantité suffisante et que le nombre de consultations en médecine de ville était supérieur à la moyenne nationale ; tout comme le nombre de séjours hospitaliers ».
La piste de la prise en charge médicale étant écartée, Rodolphe Bourret et ses équipes, se sont intéressés au suivi du patient. « Historiquement, nos établissements de santé ont été pensés pour dispenser des soins aigus et non pour prendre en charge le cycle de vie du patient dans son ensemble. Or nous sommes convaincus que pour comprendre cette surmortalité sur le territoire nous devons changer d’échelle et passer du patient au citoyen », poursuit le Directeur Général. « Nous avons donc organisé un entrepôt de données intégrant des informations, dépassant le cadre hospitalier, telles que les données sociales, éducatives et relatives à la durée de vie de la population ».
Cette nouvelle approche a notamment vocation à être déclinée dans la pharmacie « pour identifier le taux d’erreurs des prescriptions médicamenteuses ». Un sujet majeur.
Dès 2011, l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) soulignait que les accidents iatrogéniques d’origine médicamenteuse, c’est-à-dire les accidents survenant à la suite d’un traitement médicamenteux, pourraient être responsables de 60 000 à 130 000 EIG (Evénements Indésirables Graves) par an dont 15 à 60 000 seraient évitables. « Quelle est la part de ces accidents au sein du Centre Hospitalier et quel est leur impact sur la surmortalité régionale ? », s’interroge Rodolphe Bourret.
Pour le savoir, le Centre Hospitalier a décidé de recourir à l’intelligence artificielle développée par Quinten, « un cabinet d’experts en IA qui a les épaules pour un chantier de cette envergure » selon Rodolphe Bourret. Un chantier baptisé PharmIA.
« Dans le cadre de PharmIA nous avons développé une plateforme digitale d’analyse des prescriptions médicales visant une réduction de l’iatrogénie médicamenteuse et une optimisation des dépenses inutiles », commente Alexandre Templier, Président de Quinten.
« La complémentarité de nos profils nous a sauté aux yeux. Cette entreprise possède des compétences reconnues dans le développement de l’intelligence artificielle tandis que notre hôpital dispose d’une véritable expertise métier. Autrement dit, ils ne peuvent pas développer leur IA sans nos données, tandis que nos données sont inutiles sans leur technologie ! Ce partenariat est un moyen de tirer profit de la technologie pour soigner au mieux nos patients sur notre territoire grâce à une meilleure approche de la pharmacologie », s’enthousiasme Rodolphe Bourret.
Dans un premier temps, le Centre Hospitalier et Quinten axent leur collaboration sur la médication liée au diabète avant de l’étendre à d’autres environnements thérapeutiques comme la thrombose et l’oncologie.
« A long terme, la pharmacie de l’hôpital sera en mesure de personnaliser la prise en charge de ses patients, d’optimiser l’usage des produits pharmaceutiques et surtout de percer à jour les causes de la surmortalité régionale », s’enthousiasme Rodolphe Bourret.
« Nous sommes fiers de travailler avec le CH de Valenciennes sur une initiative d’une telle envergure. Il s’agit d’un projet dont l’initiative dépasse largement le cadre de l’hôpital et implique l’ensemble des habitants de la région. Avec ce projet, nous souhaitons apporter une preuve supplémentaire de la capacité de l’IA à agir dans notre quotidien » conclut Alexandre Templier.