Le 11 juin dernier, l’Arcep a lancé une plateforme de travail : « pour un numérique soutenable », appelant associations, institutions, opérateurs, entreprises du numérique, personnalités intéressées à y contribuer. Après un semestre ponctué de cinq ateliers thématiques et deux « grandes discussions », l’Arcep publie ce jour un rapport d’étape, fruit de ces échanges, et alimenté par 42 contributions écrites d’acteurs participants. Dans ce rapport, le régulateur formule 11 propositions pour conjuguer développement des usages et réduction de l’empreinte environnementale du numérique.
Afin que les réseaux d’échanges poursuivent leur développement comme un « bien commun », l’Autorité souhaite aujourd’hui intégrer plus largement la question environnementale dans son action quotidienne et les propositions qu’elle peut formuler.
Avec ce rapport d’étape, l’Arcep prend acte du fait que le numérique peut et doit prendre sa part à la stratégie bas carbone, sans pour autant renoncer aux possibilités d’échange et d’innovation que la technologie est susceptible d’apporter. Il ne s’agit pas de condamner le numérique en lui-même, ni de brider ou restreindre a priori son utilisation : certains usages participent directement à la réduction des émissions de gaz à effets de serre. Il ne s’agit pas non plus de considérer le numérique comme un secteur dispensé des efforts à accomplir pour respecter l’Accord de Paris et ses exigences nouvelles. La convention citoyenne pour le climat note ainsi que si le numérique est un levier essentiel pour la transition écologique et la lutte contre le réchauffement climatique, ce dernier ne doit pas contribuer davantage à la hausse des émissions.
C’est donc une voie du milieu entre les deux écueils du laisser-faire et de l’économie administrée qui est proposée par l’Arcep. Une mobilisation de l’instrument de la régulation en tant que courroie de transmission entre l’initiative du marché et l’exigence de l’intérêt général.
Constatant qu’une prise de conscience est déjà à l’œuvre, les propositions de l’Arcep se donnent pour objectif d’amplifier cette mobilisation, et de s’assurer qu’elle permette effectivement de dépasser le seul registre des bonnes intentions, pour s’inscrire dans une trajectoire ambitieuse de réduction de l’empreinte environnementale. Il s’agit d’inventer une régulation environnementale du numérique, intégrant non seulement les opérateurs télécoms mais aussi les fabricants de terminaux, les fournisseurs de contenus et d’application en ligne, les exploitants de centres de données… Les consommateurs peuvent aussi jouer un rôle plus actif à condition de disposer des informations utiles, dans une logique de régulation « par la donnée ».
Concrètement, cette approche et les 11 propositions formulées par l’Arcep se déclinent en trois temps :
Améliorer la capacité de pilotage de l’empreinte environnementale du numérique par les pouvoirs publics ;
Intégrer l’enjeu environnemental dans les actions de régulation de l’Arcep ;
Renforcer les incitations des acteurs économiques, acteurs privés, publics et consommateurs
Les 11 propositions sont présentées dans leur intégralité en annexe 1.
Ademe, Afnum, Aktio, Altitude, Avicca, Béatrice Bellini, chercheur, Bouygues Télécom, Commissariat général au développement durable (CGDD), CLCV Ile de France, Conseil national du Numérique, Commown, Vincent Courboulay, chercheur, COVAGE, Criteo, CSA, Digital Green, Ericsson, Facebook, Familles Rurales, FFTélécoms, Flipo Fabrice, chercheur, France urbaine, France Ville Durable, GIMELEC, Google, Green IT, HADOPI, Halte à l’Obsolescence Programmée, Les Augures, Métropole Européenne de Lille, Negaoctet, Numerisat, OVH Cloud, Qarnot, Roussilhe Gauthier, chercheur, SNCF, TeleCoop, The Shift Project, Tibco, UFC Que Choisir, Vodafone, Wifirst.
Pour mener ses travaux, l’Arcep s’inscrit dans un dialogue continu avec les pouvoirs publics. Le Haut Conseil pour le Climat ainsi que la mission d’information du Sénat portant sur l’empreinte environnementale du numérique ont ainsi auditionné l’Arcep. Les données chiffrées et pistes proposées dans le rapport publié par le Sénat ont notamment permis d’alimenter les réflexions du régulateur. La feuille de route gouvernementale visant à réduire l’impact environnemental du numérique donne elle aussi lieu à des échanges étroits avec Barbara Pompili, ministre de la transition énergétique, Cédric O, secrétaire d’Etat chargé de la transition numérique et des communications électroniques. L’Arcep a également renforcé sa collaboration avec l’ADEME (Agence de la transition écologique), avec laquelle elle partage désormais une mission conjointe, confiée par le ministère de la Transition écologique et le ministère de l’Economie et des finances. Ces travaux feront l’objet d’un rapport commun spécifique fin 2021.
L’Arcep remercie les 127 participants à la plateforme de travail « Pour un numérique soutenable » et les 42 acteurs qui ont apporté leur contribution libre au rapport.
L’Arcep, pour mieux comprendre et appréhender les enjeux liés à l’empreinte environnementale du numérique, a souhaité écouter les différentes voix des parties prenantes du numérique et de l’environnement. Au moyen de rencontres avec des experts engagés sur la thématique, mais surtout, afin de décloisonner les débats et recueillir la parole d’un plus grand nombre d’acteurs, en développant un espace de dialogue, au sein de la plateforme collaborative « Pour un numérique soutenable ». Animés avec le collectif Ouishare, pour penser le numérique soutenable dans la société de demain, ces moments de rencontre et d’échange ont permis de partager les visions, les pratiques et les outils et compétences de chacun. Et pour mieux porter les positions et propositions, l’ensemble des participants ont été invités à contribuer par écrit.
Dans la lignée de cette démarche, le rapport de l’Arcep se compose de trois volets :
PENSER, pour dresser un état des lieux des enjeux de la soutenabilité du numérique ;
ECOUTER, pour s’enrichir des échanges avec les participants à la plateforme de travail, et partager leurs contributions écrites
AGIR, pour concrétiser les réflexions et porter les proposition
L’Arcep remercie les auteurs des 42 contributions libres, placées au cœur de ce rapport : associations, think tanks, entreprises du numérique, institutions, collectivités, chercheurs, ont ainsi apporté chacun un éclairage singulier à l’appréhension globale du sujet.
La mise en place d’une régulation environnementale du numérique est une décision qui relève d’abord du pouvoir politique et l’Arcep intervient ici comme force de proposition. C’est à lui qu’il appartient de définir le niveau d’ambition et en particulier la trajectoire dans laquelle il souhaite inscrire le secteur numérique pour que celui-ci participe pleinement à la stratégie bas carbone. C’est aussi au pouvoir politique de définir, par la loi les outils de transparence, d’incitation et le cas échéant de contrainte qui permettront de donner corps à cette régulation, ainsi que les institutions en charge de leur mobilisation.
L’Arcep portera en 2021, dans le cadre de ses compétences, les propositions formulées par le rapport et continuera à travailler avec les acteurs pour faire avancer l’expertise de chacun, la connaissance des pouvoirs publics et le développement de solutions en ce sens. L’Autorité souhaite également, comme elle le fait avec les associations de consommateurs ou avec la communauté internet, pérenniser le processus de dialogue, d’écoute et d’enrichissement mutuel qu’elle cherche à construire depuis le lancement de sa démarche. Elle proposera ainsi aux participants de la plateforme et à tout acteur qui souhaiterait rejoindre la démarche, de se réunir à nouveau en milieu d’année 2021 pour faire un état des lieux sur l’avancée de ces propositions et plus généralement sur l’évolution de l’empreinte environnementale du numérique.