Delivagri développe un négoce agricole d’un genre nouveau, 100 % digital. La Start-up angevine achète et revend des matières premières agricoles et approvisionnements. Elle gère toute la logistique des échanges et s’appuie sur des algorithmes de plus en plus performants développés en interne par ses équipes d’informaticiens pour proposer le meilleur prix. Ce printemps, Delivagri a dépassé la barre des 600 000 tonnes de produits commercialisés depuis sa création en 2016 et projette de commercialiser 300 000 tonnes en 2022.
L’entreprise, qui compte 22 salariés et qui prévoit d’en recruter une dizaine supplémentaire dans les prochains mois, est ainsi devenu en quelques années un acteur qui compte dans le paysage agricole national dans un contexte particulièrement dynamique, grâce notamment à la digitalisation. La Start-up développe désormais ses activités dans plusieurs pays européens dont l’Espagne, l’Italie, la Belgique, les Pays bas et l’Espagne. Quentin de Chabot et Damien Pierre, cofondateurs, ambitionnent d’ici à 12 mois le million de tonnes commercialisés depuis le début de l’aventure avec une croissance prévisionnelle de + de 65% en 2022. En 2021, Delivagri a réalisé un chiffre d’affaires de plus de 20,5 millions d’euros.
« Céréales biologiques et conventionnelles, compost, paille, engrais, fourrages, semences... : en 6 ans, plus de 600 000 tonnes de matières premières agricoles ont déjà été mises en marché par Delivagri. Au moins 300 000 tonnes devraient l’être en 2022. D’ici à 12 mois, le milliard de tonnes commercialisées devrait être ainsi largement atteint » expliquent Quentin de Chabot et Damien Pierre, cofondateurs de cette Start-up située à Angers. Comme d’autres acteurs de l’AgTech (secteur qui utilise les nouvelles technologies au service de l’agriculture), Delivagri a connu une forte croissance depuis sa création, en 2016. Les deux ingénieurs, qui se sont rencontrés alors qu’ils travaillaient pour un grand nom de la méthanisation agricole, ont eu l’idée de créer leur start-up sur un concept assez simple : digitaliser le métier de négociant agricole. L’achat et la vente de matières premières agricoles peuvent en effet être boostés et démultipliés grâce à l’utilisation d’internet, qui permet de générer des effets de réseau entre agriculteurs et industriels.
Pour leurs débuts dans le métier, Quentin et Damien se positionnent sur le marché de la paille et du compost et utilisent des plateformes bien connues (Le Bon coin et Agriaffaires) pour poster leurs annonces d’achat et de vente. Le principe : certains agriculteurs, qui produisent des grandes cultures (céréales surtout), ont besoin de ces engrais organiques pour enrichir leurs terres. D’autres agriculteurs, éleveurs, en particulier de porcs et de volailles, ont quant à eux un excédent de cette richesse organique, par rapport à leurs besoins pour leurs terres ou celles de leurs voisins. Les éleveurs de bovins ont quant à eux des besoins en paille. Ces premiers contrats ont permis d’engager les premiers transporteurs partenaires pour réaliser ces livraisons.
Delivagri met en relation les uns avec les autres, souvent situés dans des régions de France différentes, et formalise leurs échanges avec des factures d’achat/vente. Très vite, Delivagri intègre dans ses effectifs un développeur informatique, pour créer les outils permettant de rapprocher offres et demandes, et un spécialiste logistique, pour gérer et optimiser les transports. Les flux s’intensifient, les matières premières échangées se diversifient, les clients aussi : ce ne sont plus uniquement des agriculteurs, mais aussi des industriels ou coopératives du secteur agricole, agroalimentaire ou de l’alimentation animale, de toutes tailles, en France mais aussi dans les pays frontaliers.
C’est en 2020, que Delivagri commence à acheter et revendre des céréales, grâce à la mise en réseau d’acheteurs et de vendeurs. Des spécialistes, familiers avec les notions de cours très fluctuants, de qualité et de marchés des céréales, sont intégrés à l’entreprise. Là encore, le réseau s’agrandit, ce qui démultiplie les potentialités de commerce. Les algorithmes se font plus puissants, plus pertinents, capables de déterminer la meilleure offre de prix pour un agriculteur, fonction de sa production, de sa localisation et des marchés existants.
Toujours en pleine croissance, avec ses 22 salariés (une dizaine de recrutements est prévue), Delivagri propose un modèle différent de négoce agricole, complémentaire au négoce classique. Delivagri se base sur l’économie collaborative, un principe plébiscité sur internet : chaque acteur du réseau est indépendant, mais tous sont des collaborateurs potentiels ; plus le réseau est grand, plus il est agile et puissant. Delivagri peut charger des matières premières partout en France, et répondre à tous les marchés : des produits les plus courants jusqu’aux marchés de niche.
Actuellement, Delivagri travaille avec 3000 clients, mais 30 000 agriculteurs sont inscrits sur sa plateforme pour y repérer des opportunités de marché. Son réseau logistique est aussi très développé, avec plus de 3000 transporteurs. « Delivagri, négoce 100 % digital, ne construit pas de silos, mais des architectures de données. Et on tire de la valeur de ces données », exprime Quentin de Chabot, son directeur général. Une valeur dont les agriculteurs seront les premiers bénéficiaires.
Jérôme L., agriculteur céréalier dans le Maine-et-Loire, travaille avec Delivagri depuis 2020 : il a d’abord commandé du compost et leur a vendu une partie de ses céréales. « Je les ai connus par l’intermédiaire d’un agriculteur qui collaborait avec eux. C’est une structure récente, qui a une équipe jeune, on a eu tout de suite un très bon contact. Tout se déroule très simplement. Par simple appel ou SMS, Delivagri nous envoie les prix pour un contrat, avant d’organiser le chargement de la marchandise ». Pour l’agriculteur, s’adresser à Delivagri pour vendre une partie de ses récoltes permet de se tenir informé des prix. « Pouvoir suivre au mieux les prix du marché et recevoir des offres me permet de saisir des opportunités ».
L’équilibre entre productions animales et productions végétales est l’un des piliers de l’agroécologie, les sols cultivés étant capables de valoriser les matières organiques générées par les animaux. En rapprochant les éleveurs des céréaliers, le système collaboratif proposé par Delivagri permet de recréer ces interactions vertueuses à une échelle plus large que celle du seul voisinage. Certes, ces matières organiques sont transportées, mais le modèle de réseau collaboratif avec géolocalisation des clients et l’algorithme adapté permettent d’optimiser les trajets en camion, avec, par exemple, des déchargements et chargements dans une même zone. Autre exemple de contribution à l’agroécologie : les possibilités de diversification des assolements offertes par la mise en avant de débouchés nouveaux ou de niche.
Des cultures alimentaires comme le soja, dont la demande est en forte hausse, ou plus spécialisées, comme le sarrasin, l’épeautre, le seigle meunier... peuvent contribuer à apporter de la diversité sur les sols cultivés. Des intercultures (couverture du sol entre deux cultures principales) peuvent être valorisées en tant que Cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive), pour équilibrer des mélanges destinés à la méthanisation. En outre, la publication d’offres d’achat pour des productions végétales en agriculture biologique peut inciter certains agriculteurs à franchir le pas de la conversion. Enfin, le fait de permettre aux producteurs de mettre en concurrence les offres d’achat peut contribuer à augmenter les prix de vente et donc permettre une rémunération plus juste des agriculteurs ; là encore, un objectif en phase avec l’orientation actuelle des politiques agricoles.