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Le Syane pilote depuis 2019, en partenariat avec la Ville d’Annecy, des études permettant de préciser le potentiel en géothermie de moyenne profondeur (1 à 2 km) sur le bassin annécien. Le Syane et son délégataire Altitude Infra Haute-Savoie ont répondu positivement à la sollicitation des Universités de Grenoble-Alpes et Savoie Mont-Blanc pour utiliser le réseau public de fibre optique.
L’objectif ? Expérimenter une nouvelle technologie de détection des mouvements sismiques. À terme, cette expérimentation doit permettre de mieux connaître la micro-sismicité sur la zone haut-savoyarde ainsi que la dynamique hydrogéologique de son sous-sol. Zoom sur cette expérience technologique au service de la recherche.
Olivier Coutant, physicien à l’Université Grenoble-Alpes, dans l’équipe « Ondes et Structure » et Jean-Luc Got, professeur de l’Université Savoie Mont-Blanc, monitorent et analysent la sismicité d’Epagny dans le cadre de leurs recherches. Les premiers phénomènes liés à la sismicité de cette zone ont été observés au moment du séisme M5.3 du 15 Juillet 1996, qui a ensuite été suivi par des centaines de répliques. De nos jours, des séismes de très faible magnitude continuent à se produire de manière régulière.
L’équipe de recherche a souhaité mener une expérience sur l’utilisation des câbles en fibre optique du réseau du Syane pour enregistrer des ondes sismiques en zone urbanisée. L’expérience s’appuie sur les particularités physiques du matériau « fibre optique », qui est sensible à la déformation du milieu traversé. L’équipe de recherche a demandé au Syane et à Altitude Infra Haute-Savoie d’identifier et de mettre à leur disposition un cheminement de fibre optique autour de la plaine d’Epagny. Un interrogateur DAS (Distributed Acoustic Sensing) permettant d’enregistrer les mouvements sismiques a été connecté sur le réseau en fibre. L’objectif était de tester l’enregistrement d’ondes sismiques sur ce type de réseau, selon la magnitude et la distance de l’hypocentre.
Grâce à la couverture en fibre optique de la région et aux caractéristiques sismiques de la zone d’Epagny, l’expérience a pu se dérouler dans les meilleures conditions. La disponibilité du DAS étant rare, la coordination avec les équipes d’Altitude Infra Haute-Savoie a été cruciale. Deux « fibres » ont été utilisées pour l’expérience, au départ de Meythet. La première mesure 10.09 km et va jusqu’à la Balme-de-Sillingy. La seconde, de 5.7 km de long contourne l’aéroport et va jusqu’à Metz-Tessy.
Les résultats de l’expérience ont été concluants et l’équipe de recherche est parvenue à observer plusieurs phénomènes sismiques. Il s’agit de la première fois que des observations de ce type sont effectuées et que des méthodes d’intelligence artificielle (IA) sont utilisées pour le traitement des enregistrements.
Le principe consiste à mettre en place un cheminement continu de fibre optique sur le secteur à étudier, pour y brancher un capteur. Celui-ci injecte des signaux optiques et écoute leurs retours. Il est capable de détecter les plus infimes mouvements, en particulier ceux provenant des secousses sismiques.
L’équipe de recherche a utilisé un boîtier DAS connecté à une fibre noire (une fibre qui n’est simplement pas « allumée »). Le DAS envoie des impulsions laser et enregistre les réflexions lumineuses, ce qui permet de mesurer les déformations longitudinales (suivant la longueur) de la fibre. Ces déformations sismiques sont ensuite enregistrées et rapatriées vers les stations de mesures sismiques. Si le câble s’étire de quelques nanomètres, c’est qu’une secousse a été détectée. On identifie les déformations sismiques par le fait qu’elles existent sur une portion de fibre suffisamment étendue (parce que l’onde se propage), et non pas en un seul point (comme pour une déformation statique isolée).
Les quinze kilomètres de fibre optique du réseau du Syane mis à disposition autour de la plaine d’Epagny ont permis d’enregistrer le séisme M3.2 de Dingy le 7 juin 2024 sur toute la longueur de la fibre mise à disposition. L’expérience confirme que le réseau en fibre optique permet bien d’enregistrer la sismicité. Il peut donc être envisagé pour compléter le réseau de capteurs sismiques classiques utilisés habituellement par les chercheurs. Pour la première fois, l’utilisation complémentaire de l’intelligence artificielle a permis de grandement améliorer l’efficacité du dispositif. Avec l’IA, l’interprétation des résultats mesurés par les 15 km de fibres correspondant à l’équivalent de 300 000 capteurs sismiques classiques devient alors possible. Gageons qu’un jour cette technologie sera systématiquement utilisée pour la détection et la localisation de séismes dans les Alpes, un environnement montagneux où il est parfois difficile d’installer des capteurs.
