Pour continuer de créer de la valeur et d’apporter un avantage compétitif à ses clients, l’industrie métallurgique française doit réussir à capter les opportunités offertes par cette révolution industrielle.
Revenons quelques siècles en arrière…
La première révolution industrielle apparait au Royaume-Uni dans la deuxième moitié du 18e siècle. Elle est financée par les profits tirés de l’agriculture et du commerce et repose sur l’énergie stockée dans le charbon qui est transformée en puissance motrice par la machine à vapeur. Peu à peu, la mécanisation des procédés de fabrication s’étend à d’autres secteurs tels que celui du textile ou de la sidérurgie. Cette mutation profonde de l’économie, qui bénéficie aussi de l’essor du transport ferroviaire, s’étend à d’autres pays plus tardivement, au milieu du 19e siècle. La deuxième révolution industrielle commence vers 1870 et s’appuie sur de nouvelles sources d’énergie plus performantes qui sont le pétrole, le gaz et l’électricité. En parallèle, se mettent en place de nouvelles méthodes de travail (la taylorisation), de nouveaux matériaux très performants (les aciers et les matières synthétiques), de nouveaux moyens de communication (le télégraphe et le téléphone) et de nouveaux moyens de production (les machines-outils) qui permettent un développement très rapide de nouvelles industries telles que l’automobile, l’aéronautique ou la chimie de synthèse. La troisième révolution industrielle apparait à la fin des années soixante. L’invention du transistor et du microprocesseur révolutionne le monde des télécommunications modernes et de l’informatique qui vont dynamiser les activités de la biotechnologie et de la recherche spatiale. Dans l’industrie, apparaissent des technologies telles que l’automate programmable, le robot, les progiciels de gestion intégrés, les outils de GPAO, qui permettent une automatisation poussée de la production.
Aujourd’hui, la quatrième révolution industrielle au développement exponentiel est en marche. La fusion des technologies qu’elle implique fait disparaitre les frontières entre sphères physique, numérique et biologique. L’ampleur de ces changements est telle que ce sont des systèmes entiers de production, de gestion et de gouvernance qui sont à repenser.
Les industries de la métallurgie sont-elles concernées par cette révolution ? De prime abord, on pourrait penser que ce n’est pas le cas tant elles ont des difficultés à se débarrasser d’une image poussiéreuse auprès du grand public qui associe la métallurgie aux conditions de travail pénibles du 19e siècle et à un personnel peu qualifié. Cet imaginaire collectif ne dépeint pas la réalité d’un secteur qui intègre de plus en plus de nouvelles technologies et qui est toujours à la recherche d’innovations. À ce titre, la 4e révolution industrielle est une opportunité à ne pas rater pour les entreprises de la métallurgie et de façon plus générale pour toutes les entreprises industrielles. En effet, malgré toutes les avancées technologiques, se passer du métal reste impossible. Éoliennes, prothèses de hanches, voitures, avions, etc., les pièces métalliques y sont omniprésentes et ont l’avantage d’être en général plus faciles à recycler que leurs équivalents en matières plastiques, céramiques ou composites.
Les nouvelles technologies qui se sont immiscées dans les usines manufacturières sont presque toutes des opportunités pour l’industrie métallurgique. À commencer par les robots collaboratifs (cobots) et les exosquelettes qui interagissent avec les opérateurs. Étant capables d’adapter leur comportement en fonction du contexte et de prendre en compte les actions humaines, ils peuvent permettre de limiter la pénibilité de certains postes de travail tels que ceux de l’ébarbage ou de la manutention.
Sur un autre registre, la simulation numérique temps réel fait son entrée dans l’usine. Grâce à la simulation du process de production par un jumeau numérique (digital twin), il est possible d’avoir accès en temps réel à des grandeurs physiques non mesurables pour mieux comprendre le processus industriel, détecter d’éventuelles dérives et prédire l’impact du changement de certains paramètres.
Autre brique technologique, la fabrication additive plus connue sous le nom d’impression 3D. Tout le monde en a entendu parler pour fabriquer directement des pièces métalliques. Il est tout aussi possible de l’utiliser pour fabriquer des pièces de manière indirecte. En effet, elle permet de fabriquer des moules, modèles ou outillages complexes pour la forge ou la fonderie, ce qui démultiplie le potentiel de ces process industriels pour le moins éprouvés.
Enfin, d’autres innovations commencent à émerger : la réalité augmentée permet, par exemple, d’afficher des informations ou des boutons en surimpression du monde réel pour mieux interagir avec celui-ci et adapter l’interface homme-machine au contexte. L’intelligence artificielle et le big data sont également de la partie. La mesure des grandeurs physiques clés d’un process industriel peut alimenter l’apprentissage d’un système d’IA pour optimiser le pilotage dudit process ou encore anticiper les opérations de maintenance.
Confrontées à cette accélération de la transformation technologique, digitale et culturelle, les entreprises n’ont d’autres choix que de s’adapter pour ne pas être vouées à disparaître à plus ou moins longue échéance. Et cela ne concerne pas que les petites structures. Les grands groupes industriels ne sont pas à l’abri de perdre en quelques années leur leadership. Dans un monde qui donne une part toujours plus importante au temps, ce n’est plus le gros qui mange le petit mais le rapide qui dévore le lent. Cette nouvelle forme de darwinisme force les entreprises à innover tous les jours, adopter une culture du changement permanent, s’ouvrir au maximum sur le monde extérieur pour acquérir au plus vite de nouvelles compétences et technologies et fidéliser les talents qui les maîtrisent en leur donnant un terrain de jeu unique pour expérimenter.
L’industrie métallurgique française a toujours réussi à s’adapter à toutes les révolutions industrielles. Véritable enjeu de compétitivité pour notre pays, elle doit aujourd’hui se réinventer à l’aune de l’industrie 4.0 et se montrer agile en libérant les énergies dans les usines. Comme elle est un acteur incontournable de la transition écologique, énergétique, organisationnelle et sociétale qui s’impose à nous, l’industrie métallurgique doit désormais mieux collaborer avec un large panel de parties prenantes qui ne sont pas forcément ses interlocuteurs du quotidien : acteurs privés et publics, start-up, lobbyistes ou encore société civile. Source d’innovation et réservoir d’emplois pas assez exploité aujourd’hui, l’industrie métallurgique française a plus que jamais un bel avenir devant elle !